Végétalisation de l’espace privé : où en sont les villes ?

Date de publication

mai 2024

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Tandis que les villes cherchent à accélérer leur végétalisation, elles doivent faire face à des obstacles majeurs : foncier sous pression, moyens financiers de plus en plus cadrés, contrôle toujours plus stricte de la ressource en eau… Nombreuses sont donc les villes qui intègrent dans leur portefeuille de solutions la contribution des particuliers et des privés. C’est dans ce contexte de collaboration de plus en plus étroite entre administrations publiques, citoyens et acteurs du secteur privé que  L’Observatoire des villes vertes a souhaité interroger son panel de villes*, pour dresser un panorama des différentes politiques et aides publiques mises en place pour favoriser la végétalisation de l’espace privé en ville. Quelles sont les mesures incitatives, financements, accompagnements, ou toute autre forme de soutien proposés par les municipalités pour accélérer la transition verte des villes via les espaces privés ? Quelles sont les techniques les plus mises en place, et quelles sont les limites de ces soutiens ?

Le génie écologique : une notion déjà très familière des villes et appliquée sur le terrain

Toutes les villes répondantes ont initié des projets pour inciter les particuliers à végétaliser : au minimum, les villes ont ainsi mené au minimum 2 projets (et jusqu’à 20), visant à accompagner les particuliers, les associations et les entreprises à végétaliser durablement le foncier, pour des coûts de 100 à 150€ pour des projets de végétalisations de façades, et allant jusqu’à 30 000€.

Ces dispositifs visent à favoriser une végétalisation sur le long terme. Parmi les aides financières et les subventions directes les plus implantées : les bons de plantation. Ces contributions financières de la ville à l’achat d’arbres permettent d’inciter les particuliers, les copropriétés privées et les bailleurs sociaux à planter des arbres sur leur propriété et participer ainsi à la canopée globale de la ville. C’est le cas à Caen ou Angers par exemple, qui depuis 2022 participe à 50 % au prix de l’achat de l’arbre.

Les villes accompagnent également de plus en plus les projets d’habitants ou associatifs visant à renaturer la ville, via un budget participatif, à l’instar d’Amiens depuis 2012, ou Reims depuis 2014.

Autre dispositif abondamment cité par les villes : les dons d’arbres, via lequel la ville peut offrir de jeunes arbres aux habitants de la commune.

« Les participations proposées par les collectivités pour les particuliers vont dans le sens d’intégrer les habitants à l’effort de végétalisation des villes et en premier lieu de leur environnement de vie. Également, ces actions sont d’une grande pédagogie pour donner envie de protéger leur patrimoine végétal. »
Anne Marchand, co-présidente de l’Observatoire des villes vertes.

Partager le savoir-vert et accompagner les projets

Les municipalités peuvent aussi accompagner les particuliers dans la réalisation technique de leur projet de végétalisation pour s’assurer de leur viabilité, soit en désartificialisant un pan de voie publique, soit en installant des infrastructures dédiées. À Metz par exemple, la ville installe depuis 2019 des câblages sur les façades des particuliers qui souhaitent y faire grimper des plantes grimpantes.
Les villes interrogées évoquent aussi la formation et l’organisation d’ateliers de jardinage permettant aux habitants d’acquérir des connaissances sur les plantes, les techniques de jardinage et les bénéfices sur la santé, le bien-être et la biodiversité. Cette sensibilisation accrue permet notamment de renforcer la viabilité et la longévité des projets comme pour Brest, qui propose aux habitants de venir remplir sur place leurs jardinières vides, en apprenant à les composer et les entretenir ; ou à Marseille, qui depuis cette année édite un guide du jardin privé méditerranéen pour l’entretenir en respectant la biodiversité pour des services écosystémiques plus importants.
Enfin, de plus en plus de conventions sont nouées entre les villes, les organisations communautaires, les entreprises et les résidents. Ces partenariats, qui renforcent les liens entre les différents acteurs de la ville, favorisent le partage des responsabilités et des succès. Parmi les initiatives exemplaires, on peut citer le Centre Hospitalier Régional de Metz, qui a mis à disposition de la ville en septembre 2023 une bande de terrain le long d’une voirie communale sur laquelle la ville a planté un alignement de 36 arbres.

« Les résultats de cette enquête mettent en exergue le fait que, lorsque les citoyens sont trop laissés en autonomie dans des projets de végétalisation de l’espace privé menés par les villes, cela peut se transformer en frein à long terme, notamment pour les projets qui nécessitent un suivi important et régulier. C’est pour cela que les villes priorisent le don ou le soutien à l’achat d’arbres, qui sont des projets avec des végétaux plus robustes et un entretien mieux suivi, par des professionnels du paysage. »

Laurent Bizot, co-président de l’Observatoire des villes vertes.

Des moyens contraignants malgré l’engagement des équipes municipales

Dans la majorité des cas (87 %), les élus en charge des espaces verts sont à l’initiative des projets. La moitié des projets est également portée par les maires (56 %). Les collectifs de citoyens et d’habitants ne sont quant à eux à l’initiative des projets que dans 12,5 % des villes interrogées ; une contribution plus modeste qui souligne l’importance de la sensibilisation des citoyens pour créer des dynamiques globales en faveur des villes plus vertes.
Il s’agit d’ailleurs d’un des principaux défis à relever par les villes pour accélérer les collaboration public/privés : la communication et la pédagogie représentent une difficulté pour 25 % des villes répondantes, au même titre que les coûts générés par ces initiatives (25 %) ou encore la réglementation, encore trop contraignante (25 %).
Malgré ces difficultés, les villes sont convaincues du développement de ces pratiques. Cependant, certaines pistes d’amélioration permettraient de renforcer l’efficacité de ces initiatives. Parmi les axes d’amélioration, une meilleure communication sur les conseils de plantation sur les parcelles privées semble nécessaire.
Les responsables des espaces verts appellent également à renforcer le conseil aux promoteurs et particuliers durant les phases amont des travaux de construction – avant le dépôt de permis de construire ou la déclaration préalable par exemple. Un état des lieux sur le patrimoine arboré est également préconisé, en y intégrant les espaces privés.
Autre piste évoquée par les répondants pour renforcer le rapport entre acteurs privés et collectivités : explorer les expériences et montages financiers dédiés au mécénat et aux dons vers le public, pour mieux végétaliser l’espace public.